Une brillante retraite

La campagne de Belgique s’achève avec les derniers coups de feu de Namur. Quelle que soit la responsabilité de Grouchy dans la défaite de Waterloo, éternel débat, il est certain qu’il a assuré avec maîtrise la retraite de la trentaine de milliers hommes qu’il avait sous son commandement, lesquels se sont battus avec bravoure. Le 23 juin, il est d’ailleurs nommé au commandement de l’armée du Nord, la seule à s’être sortie sans trop de mal de la catastrophe. Davout lui écrit : La Commission exécutive de gouvernement me charge de vous faire connaître que vous avez rendu à la France un service qui sera apprécié de tout le monde. Le ministre de la guerre, le prince d’Eckmül, lui écrivit que l’arrivée de ses corps d’armée à Paris firent grande impression.

Malgré tout, Grouchy est proscrit par une ordonnance du 24 juillet 1815 prise par Louis XVIII, qui ne lui pardonne pas l’arrestation du duc d’Angoulême durant les Cent Jours. Grouchy se réfugie alors aux États-Unis, à Philadelphie, où il demeure cinq années. Deux fois le conseil de guerre chargé de juger le maréchal, s’est déclaré incompétent. Par ordonnance royale du 24 novembre 1819, Louis XVIII offre à Grouchy le retour à la patrie, en le rétablissant dans ses titres, grades et honneurs, du 19 mars 1815, ce qui le prive de sa dignité de maréchal. Rentré en France en 1821, le comte Grouchy, redevenu lieutenant-général (général de division), fut mis à la retraite. Louis-Philippe lui redonne ses anciens titres et le nomme Pair de France. Une ordonnance royale du 19 novembre 1831 lui rend son titre de maréchal de France. Une autre ordonnance du 11 octobre 1832 lui restitue son siège à la Chambre des Pairs.

Il meurt le 29 mai 1847 à Saint-Étienne. Il est inhumé au cimetière du Père-Lachaise (57e division), à l’écart cependant des autres maréchaux de l’Empire. Son nom est inscrit sur l’Arc de triomphe de la Place de l’Etoile, côté Nord.

Conséquences géo-politiques et constitution d’un état tampon contre la France

Les conquêtes de Napoléon provoquèrent des guerres durant 20 ans et furent considérées  comme un obstacle majeur à la paix en Europe. En 1814 et 1815, le Congrès de Vienne réunit les grandes puissances européennes pour réorganiser l’Europe après la chute de Napoléon. Les frontières sont redessinées sans tenir compte du principe des nationalités afin d’isoler la France et d’augmenter la puissance de ses vainqueurs. Le long de la frontière nord de la France, les Pays-Bas, la Belgique d’aujourd’hui et le Luxembourg sont regroupés sous l’autorité de la couronne d’Orange (Pays-Bas) en un état tampon. De nombreuses places fortes y sont reconstruites par les Hollandais, dont la citadelle de Namur qui constitue un des témoins majeurs de la politique européenne du Congrès de Vienne.

Comment Givet est restée française après 1815

Le maréchal Grouchy quitte Givet le 22 juin, laissant le fort de Charlemont sous le commandement du lieutenant général Bourke, gouverneur des lieux. Ce dernier se retrouve alors isolé de toute communication avec ses supérieurs, à la tête de 4000 gardes nationaux peu entrainés, dont le moral est au plus bas après avoir vu les troupes de Grouchy battant en retraite. Les caisses sont vides et le gouverneur doit recourir à l’emprunt et à la vente de biens pour payer la troupe. Les désertions vont bon train. La situation est délicate. Lorsque les soldats prussiens arrivent à Givet, le prince Auguste de Prusse profite de la capitulation de Paris pour mettre la pression et exiger la capitulation du fort. Cependant, Bourke résiste et demande à pouvoir prendre des nouvelles auprès du roi de France de retour à Paris. Le prince de Prusse refuse. Le gouverneur envoie toutefois des messagers en secret. Le 30 juillet il reçoit ordre de tout faire pour conserver cette place au roi de France. La résistance de Bourke va permettre de tenir la place jusqu’au 20 novembre, date à laquelle Louis XVIII signe le traité de Paris qui scelle la future occupation de Givet par les Russes. Le traité prévoit que les Russes rendront la ville aux Français deux ans plus tard.